Cette manière d’être au monde, qui s’emploie dans mon travail graphique comme dans mes installations patrimoniales, s’est imposée à moi naturellement et très progressivement, depuis quelques années. D’abord pictural, ce langage se stabilise aujourd’hui autour d’une œuvre en impression manuelle, dans la trace laissée par la gravure. 

 

Des éléments de langages récurent arment ce vocabulaire. Des formes abstraites, qui, de taches en taches, s’agencent, s’imbriquent ou se distinguent...mais aussi et cela depuis le départ, et dans la même évidence, des signes et des figures qui disent mon ancrage dans l’histoire, le patrimoine, ou le design.

 

L’ensemble est travaillé de manière lente et précise en divers jus et reprises. Travail sur un écran et/ou travail à plat en atelier. C’est tantôt la main sur le papier ou celle guidant un outil multimédia qui délaye progressivement cette conversation (in)formelle . En surplomb l’œil domine et scrute l’ensemble. Il cherche la forme parfaite. 

 

Elle se fait ronde ou raide, calibrée, ou gourmande. Elle déborde autant qu’elle se tient.  Cette maturation essentialise et malaxe vers l’abstraction. Less is more, évidement . Entre ascèse et flamboiement. Mais pour le dire encore plus simplement, il en va de mes gravures comme de la faim qui tenaille. Il me faut avoir envie de les croquer.

 

 Le blanc laissé vacant par la taille d’épargne joue un rôle crucial dans la composition de chaque œuvre. Celui d’un passe partout «naturel» qui vient encadrer les couleurs autant qu’un «liant» entre les formes. 

 

Pour ne jamais se sentir prisonnier, «l’œil» doit circuler à l’intérieur du motif...Sortir facilement pour mieux y rentrer de nouveau. C’est libre que l’œil apprécie réellement ce qu’il voit.  Le blanc, l’épargne, joue ce rôle de libérateur, c’est une constante dans mon travail graphique... 

 

Plastiquement ce phrasé, avec ses ponctuations et la couleur semblable à un accent de rocaille disent, au fond, la même chose. Elles disent ce langage artistique qui me permet de dialoguer avec le monde extérieur et de m’accrocher - un peu - à lui... 

 

 

Olivier ROCHEAU